Manifeste

Aux sales gosses – les mots-sillons
Manifeste mutin pour un lieu fraternel

Voilà cinquante ans et plus que nous entendons, que nous répétons la même chose.
Le fric nous pourrit la vie. Nous accumulons des choses inutiles et mal fichues qui deviennent vite des déchets. Nous salissons le monde dans ses moindres recoins et dans son immensité. Nous mangeons mal et trop, nous sommes gros et malades. Ça chauffe. Tout accélère. Nos bébés sont empoisonnés, sourds, abandonnés. La laideur envahit nos vies. Nous regardons ailleurs pour éviter de voir le monde que nous continuons de fabriquer et de détruire.
Voilà cinquante ans que nous savons ce qu’il faudrait faire – partager, écouter, respecter, ralentir, juste être là… Mais ça continue pareil, rien ne change ou plutôt tout empire, les riches sont plus cupides et les pauvres plus perdus, les méchants plus bêtes et nous leur vendons des bombes, ça chauffe tellement qu’il n’est plus nécessaire de le croire pour le voir, la peur et la haine triomphent, la révolution est en panne…
On arrête de causer et on commence le monde nouveau pendant que l’ancien s’écroule ?

Imagine une maison qui respire au rythme des saisons, qui garde la chaleur du soleil et l’énergie du vent, une maison pleine de fenêtres et de grandes salles avec des canapés profonds et de petits coins pour se cacher et avec un poêle à bois pour l’hiver quand il fait froid.
Imagine un jardin qui pousse au rythme des saisons, où les fleurs s’épanouissent au milieu du potager et du verger, où tout est mélangé. Un jardin qui boit l’eau du ciel et mange les déchets de la maison et de ses habitants. Un jardin avec des abeilles pour aider les fleurs et pour faire du miel, une chèvre pour le lait, un cochon pour amuser la galerie et pour faire du lard…
Imagine une maison où tous sont bienvenus – les demandeurs d’asile et les sans-papier, les sans-emploi, les gens ordinaires et les doubles inadéquats, les fous et les sages, les bons croyants et les mauvaises filles, les musiciens et les peintres, les saltimbanques et même les banquiers. On leur sourit et on les nourrit, on leur donne ce qui pousse au jardin et chez les amis-voisins. Il y en a pour tous les goûts, les légumes et les céréales surtout, et puis de temps en temps une poulette ou un jambon, il faut bien tuer le cochon avant qu’il devienne trop gros ! On fait cuire le pain une fois par semaine dans le four à pain. S’ils veulent rester pour la nuit ou pour plus longtemps il y a des chambres. Tout est à prix libre, ils paient ce qu’ils peuvent et puis ce qu’ils veulent et plus s’ils sont contents et s’ils aiment ce qu’ils ont mangé et s’ils aiment cet endroit et s’ils ont envie que ça continue. S’ils n’ont pas d’argent ils peuvent aussi donner un coup de main au jardin ou à la cuisine ou pour agrandir la maison – c’est une maison qui pousse sans cesse et qui n’est jamais finie, qui veut toujours s’embellir pour accueillir mieux des gens qui ont des besoins différents. S’ils ne savent pas faire on peut leur apprendre et ils repartent plus habiles ou bien s’ils ne savent pas où aller ils peuvent s’installer à côté.
Imagine, et viens semer tes graines dans notre sillon…

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